La pêche au poulpe représente une source importante de nourriture et de revenus pour les communautés côtières qui dépendent de la mer pour leur subsistance. Dans le sud d’Anjouan, elle est une activité économique vitale qui crée des emplois pour les pêcheurs locaux.
Ce qu’il faut retenir sur la pêche au poulpe
C’est à pied que les pêcheurs.euses se rendent sur les coraux sur le long de la plage à marée basse, équipés d’un harpon en bois à la recherche des trous ou des crevasses dans les coraux où les poulpes s’abritent. Il s’agit de la méthode traditionnelle pour capturer les pulpes, même si certains attendre la marée haute pour attraper les poulpes en plongé.
L’accès à cette ressource n’est pas règlementé dans la région, ce qui attire beaucoup de pêcheurs sur les platiers. En plus de la surpêche, s’ajoute aussi les pratiques destructrices de la pêche avec notamment l’utilisation de la barre de fer exerçant une forte pression sur les coraux. La barre de fer traduit en comorien par « ntsontso » est l’outil le plus couramment utilisé pour attraper les poulpes. Cet outil détruit considérablement les coraux qui constituent l’habitat des poulpes et bien d’autres espèces marines.
Les femmes pêcheuses de Maecha Bora, une association fondée en 2018, ont comme objectif de coordonner une gestion durable des ressources marines dans les villages de Dzindri, Vassy et Salamani. Après avoir été formées par Dahari, les membres de l’association ont pris l’initiative de former les femmes pêcheuses de leur communauté à l’utilisation des harpons en bois ou « mwiri », une technique de pêche durable.
Les avantages d’utiliser un harpon en bois ou « mwiri »
Hadidja Bacar, membre et formatrice de Maecha Bora, a vu les avantages immédiats de l’utilisation du mwiri : « C’était lors d’une ouverture de la pêche après 3 mois de fermeture… Nous étions obligés d’apporter le harpon en bois pour pêcher le poulpe. Je n’étais pas confiant de l’efficacité de la méthode, mais à ma grande surprise, j’ai réussi à attraper des grands poulpes à 3 kilos. Contrairement à la barre de fer, quand on pique le poulpe avec le mwiri, il ressort du trou facilement sans casser les coraux. Les résultats sont impressionnants. »
Les pêcheurs utilisent le bambou pour fabriquer de solides harpons en bois. Le bambou est très robuste, mais pas assez fort pour détruire le corail. Ensuite, le bois est rasé pour avoir une boue pointue et tranchante.
Les pêcheuses de Baecha Bora en sont convaincues : le mwiri peut réduire considérablement l’utilisation de barres de fer pour la capture du poulpe, et donc la destruction des coraux, dans les régions du sud d’Anjouan. A leur initiative, elles vont former 90 pêcheuses dans les villages de Dzindri, Vassy et Salamani. De 2018 à 2022, 80% de personnes utilisent le mwiri , alors qu’avant 2018 personnes ne l’utilisait.
Plus de 90 femmes formées
Deux formatrices se rendent ensuite dans la ville de Moya pour accompagner les pêcheuses locales et partagent efficacement cette pratique afin qu’elles deviennent à leur tour des leaders locales de la pêche durable, comme les pêcheuses de Maecha Bora.
Mouniat Souf, formatrice du village de Salamani, est très enthousiaste à l’idée de partager cette technique de pêche durable. « Nous devons savoir que les coraux sont vitaux pour la biodiversité marine. C’est au niveau du corail que se déroule tout le processus de reproduction de la vie marine. Lorsque nous utilisons le harpon en bois, les poulpes sont faciles à attraper tout en protégeant les coraux, afin que la prochaine génération de poulpes puisse s’y réfugier. »
Une expérience motivante pour les deux formatrices de Maecha Bora
Hadidja Bacar a dirigé quatre formations. Selon elle, les séances étaient motivantes :« Les séances que j’ai eues à dirigées était intéressantes. Nous avons vu la théorie, puis nous sommes allées en mer et nous nous sommes entraînées avec un harpon en bois. Au moment de la pratique, les participantes voyaient clairement que ce qu’on leur a appris ne se différenciait pas de la réalité sur le terrain. Elles m’ont considéré comme des professionnels et non comme quelqu’un qui ne savait pas ce qu’il faisait… J’étais honorée de cette considération. »
Pour Mouniat Souf, c’est une initiative à prendre en main. « Ma plus grande crainte était de savoir si les gens comprendraient ce que j’enseignais. Certaines nouvelles pêcheuses qui n’avaient jamais attrapé des poulpes. J’ai apprécié leur présence, car elles ont compris les avantages d’utiliser le mwiri pour protéger les coraux. À la fin des formations, les participantes ont pu attraper un poulpe avec un harpon en bois. Je suis convaincu qu’elles pourront partager cette compétence avec d’autres pêcheuses. »