Endémique de l’archipel des Comores, la Roussette de Livingstone, une espèce de chauve-souris menacée, ne vit que sur les îles d’Anjouan et de Mohéli. Depuis plusieurs années, nous œuvrons au suivi de sa population chaque année aux côtés des Parcs Nationaux des Comores et de l’Université des Comores.
Pour mettre en lumière cet engagement partagé avec le Parc National de Ntringui, nous avons recueilli les propos de Mme Kiboutia Boura, impliquée activement dans le suivi annuel de la population des Roussettes de Livingstone en collaboration avec Dahari depuis 2022.
Présentation des Parcs Nationaux des Comores.
L’Agence « Parcs Nationaux des Comores » a été créée pour protéger et valoriser les écosystèmes exceptionnels des Comores. En tant que Petit État Insulaire en Développement (PIED), les Comores abritent une biodiversité unique, à la fois terrestre et marine, qui nécessite une gestion durable pour les générations présentes et futures. Sa mission principale est de préserver et de restaurer les habitats naturels des Comores, avec les « parties prenantes », et au premier rang desquelles les communautés villageoises. Pour cela, les Parcs adopte la « cogestion » comme approche, c’est-à-dire la gestion partagée pour mieux protéger la diversité et promouvoir le développement durable.
L’Agence coordonne la gestion des six parcs nationaux des Comores, en cogestion avec les communautés villageoises et les ONGs nationales, afin de garantir la conservation des espèces menacées et des écosystèmes tout en générant des opportunités économiques viables.

Quel rôle tu joues au sein du Parc ?
« Salut, je m’appelle Kiboutia Boura, je suis écogarde des Parcs Nationaux des Comores. Je travaille sur l’île d’Anjouan pour le Parc National du Mont Ntringui. Ce parc abrite la forêt restante d’Anjouan et représente un fort siège de notre biodiversité, avec des espèces endémiques comme la chauve-souris de Livingstone ou encore le pigeon bleu des Comores. Je participe dans les actions de surveillance au sein du Parc, sur la sensibilisation des communautés locales à l’importance de la conservation, le comptage de la roussette de Livingstone avec Dahari et dans nos activités de reboisement également avec lesquelles, nous avons bénéficié d’une formation avec Dahari sur leur approche participative. »
Pouvez-vous expliquer en quoi consiste votre rôle spécifique dans le comptage des Roussettes de Livingstone ?

« Avant d’aller sur le terrain, nous faisons des séances de recyclages au bureau de Dahari sur le protocole de comptage et nous revoyons aussi les sites dortoirs à visiter par chaque technicien. Une fois dans les sites, nous passons la journée à observer, compter les Roussettes et enregistrer les données dans des tablettes. Le travail des écogardes s’arrête là, car les données sont transférées automatiquement vers une base de données que Dahari a mis en place. »
Comment se déroule concrètement une mission de comptage pour vous ? (Préparation, terrain, suivi)
« En 2022, nous sommes formés par l’équipe Dahari sur la méthodologie et le déroulement du comptage de la chauve-souris de Livingstone. Il y a toute un protocole à suivre avant de partir sur le terrain. Il y a aussi plusieurs outils qu’on doit maitriser par exemple, savoir utiliser des jumelles pour regarder de près ou de loin les roussettes de Livingstone, marquer avec précision les points d’observation avec les GPS et nous utilisons aussi des tablettes pour enregistrer les données sur place.
Les dortoirs ont augmenté au cours des années, en 2022, il y en avait 17 sites et cette année il y a 20 qui sont répertoriés sur Anjouan. Je pense que Dahari a fait des suivis des Roussettes de Livingstone avec tags GPS pour suivre leurs déplacements, c’est grâce à ça qu’on arrive à identifier d’autres sites dortoirs.
En deux jours, nous arrivons à faire le comptage complet car nous partons en groupe de deux personnes et chaque groupe se rend sur deux sites. L’effectif est nombreux, c’est pour cela que nous arrivons à effectuer rapidement le travail. »



Selon vous, pourquoi ce comptage est-il si important pour la protection des Roussettes ?

« Parce que déjà, c ‘est une espèce endémique des Comores. Les Roussettes de Livingstone contribuent à la régénération de la forêt. C’est une des cibles de conservation pour le Parc. D’où c’est important pour nous de suivre cette espèce pour connaître son état et son évolution, afin de travailler plus sur sa protection, à travers nos actions de restauration, de sensibilisation et des surveillances que nous faisons dans les forêts. »
Qu’est-ce que cette collaboration apporte de plus au travail du Parc National ?
« Cette collaboration apporte un nouveau souffle à nos actions de suivi de Livingstone. Grâce à Dahari, nous arrivons à mieux connaître le monde des Livingstone, à identifier précisément leurs dortoirs et à comprendre leurs parcours. Cette collaboration appuie et répond à nos actions clés qui est la surveillance et la protection des espèces phares menacées et de leurs habitats. »
Quelles sont les plus grandes difficultés que vous rencontrez lors du comptage ?
« Les terrains sont parfois inaccessibles et certains dortoirs sont loin et difficiles à accéder. Nous sommes obligés de faire des marches de plus de deux heures de temps et nous positionner de loin pour effectuer le travail, c’est pour ça que les jumelles sont utiles. Ce sont des défis énormes pour moi, vu le paysage montagneux de l’île d’Anjouan, mais cela ne nous arrête pas. »

Avez-vous une anecdote marquante ou un souvenir particulier d’une mission de comptage ?
« Ce qui m’a le plus marqué, c’est de dormir sur le terrain ou dans un village voisin. Chaque année, les groupes de suivis changent, on se retrouve avec différents collègues. En fin de journée de comptage, nous nous installons dans les villes ou villages proches. A chaque sortie, je découvre de nouveaux paysages qui me rappelle notre engagement à protéger ces lieux magnifiques. »