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La fin du projet ECDD n’est que le début

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Alors que nous venons de publier les rapports finaux du projet ECDD, le Coordinateur de Projet, aujourd’hui directeur Technique de l’ONG Dahari, repense aux six années passées aux Comores.

J’ai l’impression que c’était une autre époque lorsque je suis arrivé à Anjouan en octobre 2007 pour établir la phase pilote du projet ECDD. J’avais passé trois mois aux Comores en 2005 où j’avais géré un projet étudiant dont l’objectif était de faire de la recherche sur les causes et les conséquences de la déforestation, et avec lequel, par la suite, j’avais fourni beaucoup d’effort pour établir un réseau de support et les partenariats qui transformeraient l’idée d’une intervention à long-terme en réalité. Mon arrivée représentait alors le commencement de quelque chose de nouveau et la culmination de beaucoup d’efforts.

J’ai de beaux souvenirs de ces premiers jours où tout était nouveau, j’avais la possibilité de passer beaucoup plus de temps sur le terrain, et il n’y avait pas la pression d’un budget important ainsi qu’une grande équipe et un programme de grande envergure à gérer. Nous  avons commencé le travail dans le premier  village, Kowé, en janvier 2008.  Badrou et Siti étaient avec moi à ce moment là, et depuis lors, ils ont tous les deux fait des enfants qui ont déjà terriblement grandi ! Nous passions au moins deux nuits par semaine dans le village, partageant des matelas avec ceux qui étaient assez généreux pour nous héberger. Et pendant la journée, nous discutions des problèmes de vie et de l’environnement auxquels les villageois faisaient face, et préparions notre première intervention, la création d’un jardin maraicher pour la communauté.

Petit à petit, l’équipe s’est élargie alors que nous avons étendu l’opération pour arriver à notre second village, Nindri, et recruté des experts dans l’agriculture pour gérer nos interventions concernant les moyens de subsistance. Moustoifa était une de ces premières recrues qui est toujours avec nous aujourd’hui, jouant le rôle du vieux sage de l’équipe, ainsi que Misbahou, qui est devenu notre coordinateur local et est maintenant au Royaume-Uni pour un fellowship financé par le Darwin Initiative. La croissance de notre zone d’intervention et de nos activités a continué, et en 2010, l’équipe comprenait 20 personnes et le budget annuel de £40 000 avait dépassé les £300 000.

Notre travail sur le terrain a également subi une transformation depuis les premiers jours.  Bien que le jardin maraîcher communautaire ait généré beaucoup d’argent, une grande proportion n’est pas allée là où elle était destinée. Nos analyses participatives étaient trop longues, et ne nous ont pas fourni tous les détails nécéssaires pour concevoir des interventions appropriées. Cela a été un long processus de tâtonnement, et d’apprentissage auprès de nos partenaires aux Comores et dans la région, surtout à Madagascar.

Nous sommes maintenant fiers, à juste titre, de notre impact sur les moyens de subsistance et l’agriculture dans les communautés rurales aux Comores : plus de 1800 agriculteurs ont reçu le soutien nécessaire pour améliorer leurs revenus d’une façon durable, ce qui fait environ 10 000 bénéficiaires directs en comprenant leurs familles, et des innovations introduites par le projet ECDD sont aujourd’hui reproduites par nos partenaires aux Comores et intégrées dans la politique agricole.  Nous avons également fourni les cartes des forêts et les modèles de distributions d’espèces produits par l’équipe écologique – tous uniques aux Comores – aux autorités, pour qu’ils soient intégrés aux programmes nationaux de conservation et à la création d’aires protégées. Notre travail sur la gestion collective des ressources naturelles était aussi innovant pour les Comores, avec le développement d’un modèle de travail collectif effectué avec une main d’œuvre bénévole. J’étais particulièrement ravi quand nous sommes parvenus à apprendre de nos premières erreurs à Kowé, pour aider les villageois à remplacer leur vieux système de distribution d’eau pour transformer la disponibilité d’eau pour le village entier. Un autre moment marquant pour moi a été l’effet produit par le film Hadisi ya Ismaël, réalisé à la fin de 2012 et basé sur ce qu’on avait appris tout au long du Projet, pour attirer plus d’agriculteurs vers nos activités et les convaincre d’adopter des techniques agricoles durables. Le film a fait le buzz dans les villages où on intervenait et a gagné la deuxième place au festival international inaugural de films aux Comores.

Nous avons eu des hauts et des bas, avant de connaitre ces réussites – travailler au Comores s’est avéré plus éprouvant que je n’aurais jamais pu imaginer. Le nombre important d’interventions qui ont  échouées prouve le défi que représente le fait de travailler aux Comores et est une des raisons pour lesquelles nous avons mis de temps pour gagner la confiance dans les villages. Le manque de cohésion sociale et de structures respectées de pouvoir a rendu le travail délicat, surtout les efforts concernant la gestion collective, et l’isolation éprouvée aux Comores ont produit beaucoup de défis.  Je suis très reconnaissant de l’engagement des membres d’équipe tout au long du projet, qui n’ont pas lâché prise en dépit des difficultés. Cet engagement ainsi que leurs compétences sont clairement visibles pour tous qui les rencontrent, ce qui ne manque jamais de me rendre fier.

La culmination de l’ECDD est, bien sur, la création de la nouvelle ONG Dahari, qui approche maintenant de la fin de sa première année d’existence. Nous avons consacré beaucoup de temps et d’attention au développement de Dahari, et je pense que c’est peut-être le seul élément du travail où je ne vois pas comment nous aurons pu vraiment améliorer le processus suivi. Nous avons un excellent groupe de membres qui ont élu un Conseil d’Administration engagé et compétent.  Plusieurs membres de l’équipe ECDD qui ont bénéficié de toutes les formations au cours des années du projet, sont devenus salariés de l’ONG, même si nous avons aussi saisi l’occasion d’introduire de nouveaux visages. Et l’ONG a été lancée avec une intégration déjà forte dans sa zone initale d’intervention, et avec des partenariats financiers et technique déjà organisés aux Comores, dans la région et à l’international.

Le défi pour Dahari sur le terrain est l’intégration de mesures de protection pour l’habitat et la biodiversité dans le modèle de gestion du paysage – ce que nous essayons de faire à travers l’adoption d’un système de paiement contre des services environnementaux – tout en développant un système de suivi-évaluation et en continuant à améliorer le soutien agricole. Et institutionnellement, la clé sera d’améliorer petit à petit le fonctionnement de l’ONG pour la rendre de plus en plus indépendante des soutiens externes, et de continuer d’établir sa réputation au pays et dans la région. Je suis convaincu que les bases nécessaires ont déjà été instaurées pour que Dahari réalise un changement de grande envergure aux Comores à l’avenir, et j’ai l’intention d’accompagner Dahari pendant ces premières années d’existence pour solidifier ces fondations.

Alors il me reste la tache de remercier tous ceux qui ont contribué au succès de l’ECDD et qui ont rendu la création de Dahari possible. De la part de l’équipe je veux tous les remercier, des bénéficiaires qui ont été patients avec nous pendant qu’on apprenait, aux conseillers et partenaires locaux et internationaux qui ne nous ont pas lâchés pendant les périodes difficiles. J’espère qu’ils sont aussi fiers que nous du rôle qu’ils ont joué dans ECDD, et qu’ils sont tout aussi excités que nous à l’idée des futures réussites de Dahari.